Le topic de la Liga

theo a écrit:
EDIT: Et voir les écroulements des Lions sur la pelouse à la fin du match et les larmes basques qui coulèrent dru, ça dit bien mieux que la tartine ci-dessous l'engagement de ces types dans la compèt'. Chapeau bas(que) !

theo a écrit:
Et puis j'insiste, mais contrairement à l'attitude qui préside dans nos contrées, les équipes espagnoles jouent les compétitions. A fond. Ca ne balance pas. Quand ils se cassent le cul pour arracher une place en Europe, c'est pas pour le fric puisque la Liga n'amène pas autant d'argent selon le classement qu'en France. Donc quand ils se qualifient, on sait qu'au niveau de l'encadrement du club c'est vraiment pour jouer la compétition la saison suivante. Le palmarès ça veut dire quelque chose. L'histoire et la tradition aussi.

theo a écrit:Ce qui est une info n'est pas une surprise pour autant: Guardiola quitte le Barca.
So long, Pep !
Merci d'avoir amené le binz à ces altitudes et juste: bravo !
Et merci au moment d'avoir permis que tous ces trucs soient réunis en même temps au même endroit: un club, une culture, un ADN de jeu, deux générations de joueurs, un génie, un coach, des idées et leurs application jusqu'au bout de leur logique dans des compétitions d'élite.
Heureux d'avoir assisté à ça.

theo a écrit:Le Real Zaragoza, club officiel de la famille aragonaise du côté de ma môman est sauvé.
Non pas de la descente, qui se joue sur cette dernière journée en Liga où le bas de tableau est serré du slip assez sévère, sauvé non pas de la descente donc, mais de la disparition.

En effet, la juge chargée des affaires commerciales de Saragosse a signé l'acte qui valide la sortie officielle du redressement judiciaire sous lequel le club évoluait depuis juin 2011.
Cela veut dire qu'il reprend une vie normale, sans administrateur judiciaire. Il a été jugé viable et de nouveau solvable pour le long terme. La dette du club n'est pas apurée mais il a démontré qu'il pouvait faire face aux échéances de remboursement des 110 millions d'euros qu'il doit à ses créanciers.

L'état du foot espagnol est catastrophique. 22 des 23 clubs en cessation de paiement en Europe (toutes divisions confondue) sont espagnols. On y trouve entre autres: Sporting de Gijón, Málaga, Real Zaragoza, Levante, Real Sociedad, Mallorca, Racing, Betis, Rayo Vallecano et Granada.

A titre d'info, au moment où la dette de Saragosse était évaluée à 110 millions d'euros, l'endettement global du foot espagnol de Liga (1ère division) s'élevait à 3,5 milliards d'euros.

Au palmarès de la dette on trouvait:

- Real Madrid: 680 millions,
- FC Barcelone: 490 millions,
- FC Valence: 550 millions,
- Atletico Madrid: 511 millions,
- Villareal: 240 millions.

Dans l'absolu, une dette n'est rien tant qu'on peut la rembourser soit en générant un chiffre d'affaire qui permet de payer les charges du club (salaires, immobilier, échéances des crédits, déplacements, achats...) et/ou qu'on réussit à lever des capitaux supplémentaires comme: des augmentations de capital, des ventes d'actifs, des droits TV, des droits liés au place atteintes en fin de championnat, des primes perçues au titre des trophées gagnés localement ou en Europe...

Une dette n'est pas une tare ou une truanderie sportive quand elle sert à investir dans un produit qui rapportera de l'argent ensuite comme un stade par exemple (la grande force des clubs anglais et surtout allemands sont ces stades qui leur appartiennent et génèrent autant revenus qu'ils ne doivent pas aller chercher auprès de banques), tant qu'elle est sous contrôle et qu'on est certain que les clubs ont les moyens de payer ce qu'il doivent, tant qu'elle ne sert pas à financer un train de vie qu'on ne peut pas se permettre.
Elle devient préoccupante quand elle sert à financer des transferts énormes sur des joueurs qui ne rapporteront pas en retour la somme mise sur la table (par la vente de maillots, l'augmentation des ventes de places, les droits publicitaires, le revente à la fin du contrat avec une plus-value...). Elle devient préoccupante quand elle sert à payer des salaires qui ne cessent d'augmenter.

A niveau équivalent les dettes espagnoles sont plus 'risquées' que les dettes anglaises ou allemandes.
Ainsi et par exemple, les stades sont vieux et inadaptés à l'évolution marketing du foot pro de haut niveau (impossible d'y construire des restau, des bars, des magasins, des salles à louer, des espaces qui gardent le spectateur captif et le transforme en consommateur et qui permettent en plus une activité lucrative en dehors des jours de match). Vu le niveau de notoriété du Real Madridet du FC Barcelone, des stades modernes généreraient un chiffre d'affaire monumental au regard de ce que l'exploitation des Santiago Bernabeu et Camp Nou rapporte aujourd'hui.

De plus, mécaniquement les clubs ont perdu de la valeur à cause des stades. En effet pendant des années les clubs propriétaires de leurs stades ont vu leur valeur augmenter en même temps que la bulle immobilière augmentait. Emprunter beaucoup et à taux faible était donc plus aisé. Années florissantes en terme d'entrées d'argent. Florentino Perez (président du Real et patron d'une multinationale du BTP), pendant sa première présidence du Real, a su en profiter en vendant au bon moment les terrains des installations historiques du club (centre de formation, centre administratif...) situés en plein Madrid pour construire un centre ultramoderne en périphérie. Plus-value monumentale. Double d'ailleurs puisque son entreprise du BTP a participé avec d'autres à l'achat des terrains et fait construire dessus des immeubles d'habitations, des locaux d'entreprises, des centres commerciaux, à participé à des rénovations d'infrastructures (routes, stations de métro...) sur lesquels il a tout à fait normalement gagné de l'argent soit en temps que promoteur, soit en tant qu'exploitant des baux commerciaux. Mais ceci est une autre histoire.
Avec la crise, la bulle immobilière a explosé et le prix du mètre carré s'est effondré. Du coup la partie foncière de la valeur des clubs a fondu. Mécaniquement.
Imaginons un club dont la valeur serait de 500 millions d'euros, composée à 50% de sa valeur foncière (soit 250 millions). Si la valeur du foncier s'écroule de 50%, la valeur du club passe donc mécaniquement dans l'exemple de 500 millions à 375 millions.
Ca ne change rien au montant de sa dette. Mais du coup les emprunts nécessaires au fonctionnement de ce club (normal pour toute entreprise) coûtent plus cher auprès des banques. Les taux proposés sont plus élevés et les remboursements coûtent plus chers au long terme et donc la charge de la dette est plus lourde à assumer.
Les clubs espagnols sont dans cette situation.
Pendant les années où l'argent a coulé à flot par la simple augmentation de la valeur des clubs (boostée par la hausse des prix de l'immobilier), aucun n'a cherché à utiliser l'argent pour assainir les dettes déjà existantes. Ils ont continué à dépenser cet argent en augmentant salaires, montant des transferts, dépenses somptuaires... Ce n'est pas propre à l'Espagne mais ça y a été juste plus extrême qu'ailleurs.

Ensuite, quelque chose de pourlingue.
Une part importante de la dette des clubs espagnol est une dette sociale. Autrement dit, les charges de sécurité sociale, de chômage, d'apprentissage, les impôts... ne sont pas payés au Trésor Public. Au-delà du fait que ce soit (pour moi) éthiquement puant, au moment où l'Espagne en pleine austérité découvre que même les fonds du trou se creusent aussi facilement que du sable humide d'une plage de Méditérranée, ça fait plus que tâche. Mais surtout: où est l'Etat dans tout ça ? Il accepte une dérive plus que symbolique. Les montant dus au fisc s'élève à 752 millions d'euro (21,5% de la dette globale des clubs) ! Là, par contre, la liste des clubs ne payant pas le fisc n'est pas publiquement connue.

Plein d'autres choses peuvent être dites sur ce thème, sur les joueurs sans salaires, sur la part des droits télé en Espagne, sur le fair-play financier... et si ça en intéresse certains je peux apporter d'autres éléments en essayant d'être le plus compréhensible possible...

Pour boucler et à aujourd'hui, l'avenir est tendu puisque les banques espagnoles sont plombées comme jamais et qu'elle ne pourront prêter qu'à des taux d'autant plus élevés que les clubs resteront fragilisés. L'Etat et les provinces aux abois ne pourront sûrement pas laisser la dérive de la dette sociale continuer. Et le Roi ne pourra plus comme il l'a fait il y a une grosse dizaine d'années effacer d'un décret royal (au bar en l'occurrence) la dette publique du Real Madrid.

Bouclage sur le Barca (qui lui ne peut plus trop compter sur les z'yeux fermés des institutions financières, bancaires, politiques, publiques catalanes qui finançaient à fonds presque perdus un étendard identitaire fort autant qu'un club, ni sur TV3 qui surpaye depuis toujours le droit à la diffusion des matchs pour la Catalogne et pour le petit logo sur la manche du maillot -seule pub tolérée pendant des années sur l'ex vierge maillot blaugrana) bouclage sur le Barca donc, à travers ces quelques lignes tirées d'un article des Echos paru en fin de saison dernière: "Décrocher des titres ne semble plus suffire pour remplir les caisses. Vainqueur cette saison du championnat d’Espagne et de la Ligue des champions, le Barça a annoncé une perte de 21 millions d’euros pour 2010/2011, après un déficit de 83 millions l’an dernier. Du côté du Camp Nou, l’heure est d’ailleurs aux économies... mais dans les autres sections du club omnisports. Car cette année, l’équipe de Guardiola pourrait recevoir le renfort de Cesc Fabregas, le meneur de jeu d’Arsenal, dont le transfert avoisinerait les 50 millions d’euros…"

La politique de recrutement du Barca l'été dernier et le choix de lancer tant de jeunes issus de la Masia doit aussi s'évaluer à l'aune de cette donnée économique.

Mais enfin, pendant ce temps-là, le Real Zaragoza commence à sortir la tête de l'eau. Et c'est le principal pour ma môman !